En quoi Star Wars IX est-il un épisode décisif ?

Cette année sortira le dernier volet de ce qu’on appelle désormais la postlogie Star Wars. Et pourtant, l’annonce d’une nouvelle trilogie par Disney ne semble pas remonter à plus loin qu’hier ! Les deux volets numérotés sortis jusqu’ici, The Force Awakens et The Last Jedi, ont comme la prélogie en son temps, suscité de nombreux débats et divisés les spectateurs. Plus que jamais, l’épisode IX (encore sans nom) semble être déterminant dans l’empreinte que laissera cette nouvelle pierre à l’édifice de George Lucas. Mais plus qu’une impression, le défi de Disney est bel et bien réel. Voyons en quoi.

Deux choses à préciser avant de commencer :

  • J’apprécie fortement The Force Awakens et The Last Jedi, cet article n’est donc en aucun cas un règlement de compte.
  • Il y aura du spoiler sur les huit films numérotés sortis mais pas sur l’épisode IX si ce n’est la mention d’une petite rumeur.

La tournante des réalisateurs

Il s’agit tout d’abord de contextualiser tout ça. Alors qu’aucun des trois volets n’était encore sorti, il avait été annoncé que trois réalisateurs différents se chargeraient d’un opus chacun. J.J. Abrams pour le premier, Rian Johnson pour le second, et Colin Trevorrow pour le dernier. Une feuille de route à peu près tenue, si ce n’est que Trevorrow, réalisateur du premier Jurassic World, s’est vu retirer le projet pour différent créatif. Sans trop laisser de temps pour les hypothèses, Disney annonce que c’est Abrams qui reviendra clôturer la trilogie. Un retour qui ne met pas tout le monde d’accord. Si son nom rassurait avant la sortie de The Force Awakens, ce premier volet de la postlogie avait finalement déçu une part non négligeable des spectateurs, lui reprochant principalement de trop ressembler à l’épisode IV : A New Hope. Néanmoins, The Last Jedi est arrivé, et avec lui un lot de haine peut-être sans précédent pour la saga, allant jusqu’à susciter des pétitions pour l’effacer de la chronologie. Notamment en cause : une volonté de prendre à revers tout ce qui avait été établi dans The Force Awakens, coupant dans l’œuf (façon de parler) les débuts d’intrigues lancés par Abrams. Avec son retour s’est réveillé un certain espoir de voir cette trilogie être sauvée de l’échec total (c’est une opinion, pas la mienne), ou tout du moins de tenir à peu près debout en donnant une conclusion à ce qu’il avait initialement lancé.

Abrams Johnson Star Wars
J.J. Abrams et Rian Johnson, les deux réalisateurs de la postlogie

Ça, c’était pour un historique résumé des événements externes aux films eux-mêmes, déjà révélateurs d’un certain bordel organisé. C’est notamment ce qui arrive quand on ne part pas avec une feuille de route plus ou moins bien définie pour l’ensemble de la trilogie, comme Disney l’a fait, laissant le soin aux réalisateurs de chacun poursuivre l’intrigue comme bon leur semblaient si tant est que la destination soit celle voulue. Alors oui, il en résulte une certaine liberté artistique, mais dans le cadre d’une licence telle que Star Wars, un minimum était demandé en terme de cohérence. Plus que cela : après deux films, on peine encore à savoir quel est réellement l’intérêt de cette postlogie dans la saga Skywalker, ce qu’elle apporte vraiment à l’édifice global.

Une trilogie sans but

La première trilogie (IV, V, VI) était le socle, on n’attendait rien de particulier d’elle. C’est notamment pourquoi elle a pu se permettre d’être écrite au fur et à mesure également, mais toujours avec George Lucas en chef d’orchestre, maître de son univers. Si l’on devait dégager une thématique principale, c’est celle de la rébellion contre un système tyrannique pour finalement le renverser. Des années plus tard est venu ce qu’on appelle la prélogie (I, II, III), entièrement réalisée par George Lucas. Cette fois-ci il s’agit de montrer comme la République a pu être renversée pour laisser place à l’Empire. Bien entendu, ces grandes histoires sont intrinsèquement liées à une échelle plus humaine. Dans la trilogie originale, on suit le parcours d’un jeune fermier (Luke Skywalker) qui deviendra un maître Jedi et parviendra à ramener son père (Anakin/Dark Vador) vers la lumière tout en évitant l’obscurité lui-même. Par conséquent, la prélogie nous montre comment Anakin est passé d’un Jedi prometteur à un Sith bras droit d’un Empereur tyrannique. C’est très résumé, mais le sujet n’est pas tant ces deux trilogies que celle qui  les suit.

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Avec la prélogie, on sait enfin comment la République a sombré

Si George Lucas, le grand manitou, avait initialement des plans pour la postlogie, il y a renoncé quand il a vendu son entreprise et son bébé à Disney, désormais seul maître à bord. Après la réception mitigée de la prélogie par les spectateurs, une certaine volonté de revenir aux fondamentaux émerge aussi bien de l’entreprise que du premier réalisateur choisi : J.J. Abrams. Le résultat, on le connait : The Force Awakens n’est pas un copié/collé de l’épisode IV mais il emprunte tout de même sa structure. En soi, pourquoi pas, Star Wars repose sur des jeux de miroirs entre chaque volet, mais était-ce vraiment le plus judicieux à faire ? Après la victoire des Rebelles sur l’Empire à la fin de l’épisode VI, on revient 30 ans plus tard à un conflit du même type, comme si rien n’avait vraiment changé. Encore une fois, pourquoi pas, d’une certaine façon c’est cohérent et logique. Le problème, c’est que ce contexte géo-politique est tenu assez flou, presque de façon secondaire. Rien d’irréparable par la suite, mais The Last Jedi de Rian Johnson fait le choix de se placer directement après les événements du premier volet, ne permettant pas vraiment de mettre en perspective le contexte et les enjeux. Non pas qu’il n’y en ait pas, loin de là, mais quel est réellement le but de cette trilogie ? Resservir le même conflit que dans la trilogie originale pour le finir de la même façon, jusqu’à la prochaine trilogie ?

Star Wars Celebration
Aura-t-on droit à une nouvelle victoire… jusqu’à la prochaine trilogie ?

A l’échelle humaine, le problème est assez semblable. Vous n’êtes pas sans le savoir, la saga numérotée appartient aux Skywalker, c’est leur histoire, chaque trilogie déroulant celle d’une nouvelle génération. Pour la postlogie, le nouveau représentant de cette lignée est Ben Solo, a.k.a Kylo Ren, un autre Skywalker ayant mal tourné mais toujours sur le fil du rasoir entre le Bien et le Mal (tout du moins jusqu’au dernier acte de The Last Jedi). Personnellement, j’adore ce personnage et je le trouve très intéressant, mais encore une fois, qu’est-ce-que cette trilogie tente de nous raconter à propos des Skywalker ? Ils sont faillibles ? Ce n’est pas le même contexte que pour les deux autres trilogies, ici il est surtout question d’un héritage difficile combiné au poids des légendes, mais globalement rien de nouveau sous le soleil pour les Skywalker. Si je dis « globalement » c’est par rapport à l’échelle cosmique de Star Wars. Dans la prélogie, George Lucas a fait apparaître un nouveau concept à la saga, celui de l’Équilibre dans la Force, et notamment d’un Élu dont le devoir est d’apporter cet équilibre. Une notion finalement assez vague : l’équilibre signifie-t-il la victoire de la lumière sur l’obscurité ? Une balance entre les deux ? Au final, aucune réponse n’est vraiment arrêtée : pour Yoda c’est la première option, pour Luke et Snoke (dans The Last Jedi) c’est plutôt la seconde. Pour ma part, je tends à voir les choses de cette façon : l’équilibre n’est pas une balance entre les deux côtés, mais davantage une victoire du Bien. La Force serait fondamentalement lumineuse, c’est pourquoi elle serait toujours en faveur des Jedi. L’équilibre serait néanmoins perturbé quand le côté obscur tenterait de la soumettre à sa volonté contre-nature, de la pervertir. Mais bien entendu, c’est sujet à débat, c’est ce qui fait la force de cette notion.

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Voilà, comme ça t’auras jamais de réponse

Dans la prélogie, l’équilibre est progressivement défait par l’ascension des Sith, et l’Élu (Anakin) échoue à son devoir en pervertissant cet équilibre, en « condamnant la Force à la nuit » comme le dit Obi-Wan dans Revenge of the Sith. Dans la trilogie originale, c’est un nouvel espoir qui émerge, un héros, la descendance de l’Élu. Luke parvient à ramener son père sur le chemin qui devait être le sien, à lui faire accomplir la prophétie (ou serait-il devenu l’Élu à son tour ?). Bref, l’affaire était torchée (pardonnez le langage) à la fin de l’épisode VI, ou tout du moins si l’on s’arrêtait là. Les comics poursuivaient l’éternel combat, et bien qu’ils aient été effacés de la continuité avec l’arrivée de la postlogie, cette dernière fait perdurer elle aussi la lutte entre la Lumière et le Côté Obscur. Du coup, la prophétie c’était du pipi de chat ? Les sacrifices n’ont servi à rien ? Y’a-t-il seulement une victoire de la Lumière qui pourrait être permanente ? L’équilibre n’est-il voué qu’à être temporaire, l’obscurité étant elle voué à toujours revenir ? Ou l’équilibre serait-il finalement la balance entre les deux côtés ? Dans ce cas, pourquoi nous faire toujours autant prendre parti pour la Lumière ? Bref, autant de questions qui sont sujettes à interprétation personnelle et sur lesquelles on attendait de cette postlogie un certain positionnement, à tord. Les réponses, quand il y en a, sont toujours aussi floues, comme si cette nouvelle trilogie n’était pas un pan majeur mais simplement une nouvelle étape du conflit éternel. Là où les deux précédentes déroulaient des époques décisives, l’intérêt de la postlogie semble résider principalement sur le suivi des héros auxquels nous nous sommes attachés il y a trente ans. Mais il faut aussi savoir prendre les réponses qui nous sont donnés, notamment dans The Last Jedi lors de la confrontation Rey/Ben/Snoke. Selon le mystérieux vilain, quand le côté Obscur s’élève, la Lumière vient nécessairement le rencontrer : au fur et à mesure que la puissance du Mal grandit, son égal dans le Bien également. Au final, si l’on boit ses paroles, c’est là qu’est l’équilibre, et Rey est en fait une championne envoyée par la Force. Mais quid de Ben ? Quel est le rôle des Skywalker dans cette histoire ? Est-ce encore seulement leur saga ? Bref, nous sommes aux deux tiers de la trilogie, et nous ne pouvons pourtant pas encore dégager son intérêt au sein de la saga Skywalker, la pierre qu’elle apporte à l’édifice.

Rey Sabre Laser Anakin
Quel est le véritable lien entre Rey et les Skywalker ?

Abrams/Johnson : Le diptyque malgré lui

Ainsi, il ne reste plus qu’un film pour conclure cette trilogie qui devra se suffire en elle-même. Et pourtant, tout reste à faire. Rendez-vous compte, 66% de la trilogie s’est déroulé sur à peine une semaine là où les précédentes s’étendaient sur des années, voir plusieurs décennies. L’intensité dramatique et les enjeux, comme nous le disions précédemment, n’ont pas encore vraiment eu le temps de s’installer, car soit mal présentées, soit n’ayant pas eu droit à assez de recul. La faute serait facilement à incomber à Rian Johnson pour avoir choisi d’innover en réalisant un volet faisant directement suite au précédemment. Rajoutons à cela le fait que son opus fasse un sur-place volontaire, et nous avons le coupable tout trouvé. Mais il ne faut pas oublier que c’est tout d’abord Abrams qui a démarré cette trilogie avec un contexte et des enjeux pas bien définis et/ou pas très originaux. Sans compter que c’est aussi lui qui a choisi de finir The Force Awakens littéralement et figurativement sur un cliffhanger (une fin à suspens), forçant presque la main à son successeur.

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Deux ans d’attente… Ça fait une sacrée crampe

Au delà de cet immobilisme complice, une certaine dualité se joue entre les deux réalisateurs, ou plutôt leur opus respectif. Dans The Force Awakens, Abrams a lancé tout un tas de pistes ouvertes, laissant le soin à ses successeurs de les poursuivre selon leur gré, ce qui est une pratique habituelle du réalisateur. Vous connaissez l’histoire de la boîte ? Il y a de nombreuses années, Abrams a acheté une mystérieuse boîte dont le contenu lui était inconnu… et l’est toujours aujourd’hui. Le réalisateur préfère entretenir ce mystère, laissant le contenu être tout ce que son esprit peut imaginer. Cette pratique, il l’a notamment menée dans Lost, qui a du par la suite trouver des réponses qui ont forcément déçues un certain nombre de spectateurs. Visiblement, c’est la déception qui l’a emporté chez les spectateurs suite aux choix opérés par Johnson dans The Last Jedi, qui prend à contre-pied son prédécesseur, si ce n’est de la saga entière. L’exemple le plus parlant est celui de Luke jetant son vieux sabre laser par dessus son épaule, là où le public avait attendu depuis deux ans une réaction pleine de gravité, une réaction solennelle. Là où personnages comme spectateurs attendaient un Luke maître Jedi prêt à aider, il est tout l’inverse et pense que les Jedi doivent mourir car n’ont fait que trop de mal, ce qui prend aussi à contre-pied l’image valorisante créée jusqu’ici. Dans un autre genre, c’est la structure même de la trilogie qui est prise à revers : Abrams avait réalisé un film similaire à l’épisode IV, ne laissant à ses spectateurs quasiment que le choix de poursuivre dans cette lancée en reprenant la structure de la trilogie originale. Néanmoins, Johnson décide de ne pas subir et d’accélérer le pas en reprenant l’affrontement final de l’épisode VI quasiment mot par mot, mais cette fois-ci dès le second volet. Snoke a été tué par Ben Solo, mais ce n’est pas la fin de l’histoire,  il reste encore un film et on ne peut alors plus se reposer sur le schéma traditionnel ! C’est à ce moment que les choses changent véritablement puisque Ben, au contraire de Vador en son temps, ne trouve pas de rédemption mais devient plutôt le leader du côté obscur. Utiliser la structure en miroir de Star Wars pour mieux la briser, ce n’est pas spécialement ce qu’il y a de plus fin, mais c’est habile.

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Cette scène est la pierre angulaire de la postlogie

Et cette volonté de contre-pied s’applique même au niveau des nouveaux personnages que sont Rey et Ben. Pour ce dernier, Johnson fait dire à Snoke dès le début de The Last Jedi qu’il a été complètement ridicule dans The Force Awakens, et lui fait symboliquement détruire le masque qui faisait son identité dans le film précédent. Ce personnage regardait trop vers le passé, il voulait trop ressembler à la figure qu’était Dark Vador, alors on supprime ce désir pour le faire aller de l’avant, ce que Johnson fait à nouveau dire clairement à travers le personnage. Le danger est alors qu’Abrams fasse preuve par la suite d’un certain égo ou d’une mauvaise compréhension des besoins de la trilogie. En effet, une rumeur prétend qu’il redonnera à Ben son masque dans l’épisode IX. Si cela s’avère vrai, et bien qu’il faille attendre le contexte pour réellement juger, on peut déjà penser que la postlogie n’ira pas bien loin. Désormais, il ne s’agit plus de rattraper ce qui est considéré comme une erreur par certains, mais bien de faire avec tout ce qui a été posé pour livrer une conclusion la plus satisfaisante possible. Il y a déjà bien trop à introduire et conclure pour se permettre de revenir en arrière. 

Ben Solo Kylo Ren
Ben Solo peine énormément à définir son identité

Un constat similaire s’applique à Rey, qui a cristallisé quasiment toute l’attention à travers la question de son identité. De mon point de vue, The Force Awakens laisse presque autant d’indices sur une ascendance quelconque que sur une ascendance Skywalker. Cependant, la réponse la plus littérale apportée par le film est la première option, celle qui sera retenue par Rian Johnson dans The Last Jedi, celle qui semble la plus logique, mais qui se voit toujours sujette à interprétation. Johnson semble avoir  réellement posé son identité, et en ce sens il serait dommage de revenir dessus, pour une question de temps comme je le disais précédemment, mais aussi pour le message transmis par cette réponse : il n’est pas tant question de ses origines que de ses actions pour le Bien. Nul besoin d’avoir du sang Skywalker pour être un champion de la Force, pour être un héros, et c’est dans ce sens que va la dernière scène du film où un petit garçon attrape un balai avec la Force, là où les épisode numérotés finissaient toujours sur une vue d’un ou plusieurs personnages principaux. On ne peut toutefois pas être complètement catégorique, car quelques doutes restent bel et bien présent et il ne serait ainsi pas insensé de revenir sur cette affirmation. Si tel est le choix d’Abrams, il faudra par contre que la remise en question de son identité fasse partie intégrante de l’histoire, permette d’y mettre un terme et apporte une réelle pierre à l’édifice Skywalker.

Rey Nobody
Les réponses données à Rey viennent du côté obscur, alors prudence

Le défi est finalement de ne pas tomber dans le fan-service, ce qui serait à mon sens difficile pour tout humain dans la position d’Abrams. Le bougre s’est fait huer pour son The Force Awakens et a maintenant une chance de se rattraper aux yeux des fans suite à The Last Jedi qui a encore plus été boudé que son film, et qui pourtant faisait l’inverse. A partir de là, il serait facile de donner ce que les fans veulent : une Rey Skywalker, un Kylo Ren plus qu’un Ben Solo, et même un Snoke en réalité Dark Plagueis  (le maître de feu Palpatine) ou toute autre entité ancienne. Et oui, bien que le leader du Premier Ordre se trouve en bien mauvais état (et c’est un euphémisme), Abrams pourrait toujours le ramener en lui donnant le passé qui lui a été refusé (qui n’était pour moi pas nécessaire) et que les fans demandent. Vous l’aurez compris, une erreur à mes yeux puisque cela nécessiterait de revenir en arrière sur un élément pourtant déjà conclut. Néanmoins, ce procédé peut permettre de donner une certaine force à une oeuvre en lui donnant un nouveau degré de lecture et de nouveaux enjeux (le fameux « en fait c’était sa sœur/sa mère/son père/son frère/son cousin germain/son chien »). Mais n’oublions pas que la mort de Snoke a pour but de mettre plus en avant Ben Solo, volant maintenant de ses propres ailes. Avec ce dernier acte, le personnage devient le leader du Premier Ordre, c’est-à-dire la menace ultime, alors qu’il est en même temps ridiculisé et montré comme clairement inapte pour le moment à endosser ce rôle. Heureusement, Johnson livre une fin contenue qui peut maintenant laisser la place à un dernier opus qui prendrait place des années plus tard.

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Une déclaration pleine d’amour et de sincérité

Le cahier des charges de l’épisode IX

La renaissance de l’ordre Jedi

Si l’on ne sait pas encore quand se déroulera le prochain volet, il faut espérer qu’Abrams choisisse de sauter quelques années pour le bien de la trilogie, car ce n’est à mes yeux que de cette façon qu’elle pourra prendre son envol et lui donner une certaine grandeur qui lui manque. Après l’épisode VI, et avec trente ans d’attente, les fans s’étaient bien évidemment imaginé un futur grandiose redonnant à la République toute l’ampleur qu’elle a eu lors de la prélogie. Que nenni, autant sur le contexte quasiment figé sur place que sur la position de l’ordre Jedi, la situation est au contraire plutôt pitoyable. Rien d’incohérent, là n’est pas le problème, mais il faut maintenant songer à faire évoluer la situation, autant pour livrer l’originalité et la grandeur attendue et nécessaire. De ma fenêtre, il faudrait donc effectuer un bond temporel de plusieurs années afin de changer considérablement la donne. Rey aurait eu le temps de mériter la puissance qu’elle détient et de faire ses preuves. Comme Luke l’a annoncé, l’ordre Jedi ne serait pas mort avec lui mais ressuscité par cette championne du Bien. Oui, elle n’est pas vraiment formée, mais Luke ne l’a pas été tant que ça non plus en comparaison des Jedi de la prélogie. De plus, on peut observer dans The Last Jedi qu’elle a en sa possession les textes du premier temple Jedi, lui donnant des connaissances théoriques non négligeables. Finalement, The Last Jedi exposant justement les erreurs commises par les Jedi, notamment lors de la prélogie, il serait complètement logique de fonder un nouvel ordre différent de l’ancien (sans perdre de vue ses valeurs). Avec de nouveaux Jedi formés, ou tout du moins des apprentis, la bataille prendrait une envergure disparue depuis la prélogie.

Yoda The Last Jedi
Si même Yoda admet que les Jedi ont merdé…

Des liens renforcés entre les trois héros

Parmi ces jeunes Jedi, il serait notamment appréciable de voir figurer Finn, dont la place dans cette histoire reste encore nébuleuse, et qui a dans The Force Awakens fait preuve de certaines capacités allant dans le sens d’une affinité à la Force. Les liens entre Rey et lui se resserreraient alors, prolongeant la complicité introduite par Abrams et complètement absente de The Last Jedi. Ne manquerait alors plus qu’à ajouter Poe Dameron dans l’équation, lui qui sera vraisemblablement le leader des Résistants suite à l’inévitable mort de Leia. En effet, alors que les deux précédentes trilogies mettaient clairement en avant trois figures de proue, un trio très lié (Luke/Leia/Han pour la trilogie originale, Anakin/Padme/Obi-Wan pour la prélogie), cet élément est complètement absent de la postlogie. Ce n’est pourtant pas faute de faire reposer Rey, Finn et Poe côte à côté sur les produits dérivés et certaines affiches promotionnelles. Néanmoins, à l’écran jamais ces trois personnages n’ont été réunis, si ce n’est à la fin de The Last Jedi, sans qu’aucune interaction à trois n’est été donnée. Il serait grand temps de réparer cette injustice afin d’avoir en mémoire un nouveau trio emblématique.

Finn Rey Poe
Ceci n’est littéralement jamais arrivé

L’avènement des Chevaliers de Ren

Avoir un groupe de Jedi, c’est bien beau, mais pour que ce soit vraiment épique, il faudrait des pratiquants du côté obscur en face d’eux (pas des Sith, parce qu’ils n’existent plus). Heureusement, Abrams a déjà semé dans The Force Awakens la graine qui permettrait de voir arriver un tel groupe : les chevaliers de Ren, ordre dont Ben Solo est le maître. A eux seuls, ils constituent l’une des plus grandes attentes des fans, et à raison puisque jamais nous n’avons eu en films un groupe d’utilisateurs du côté obscur de la Force supérieur à deux personnes. Absents regrettés de The Last Jedi, l’épisode IX est leur dernière chance d’apparaître, ce qui apparaît comme une étape quasi obligatoire et nécessaire pour redorer l’image du Premier Ordre. Néanmoins, leur absence sera en elle-même un élément qu’il faudra justifier, au risque de tomber comme un cheveu sur la soupe. A priori, ils sont toujours vivant puisque Snoke parle de ce groupe comme étant actuellement sous le leadership de Kylo Ren. Mais où sont-ils partis ? Participent-ils à asseoir l’autorité du Premier Ordre aux confins de la galaxie ? Réalisent-ils une mission pour Snoke ou pour Ben ? Ils semblent d’ailleurs liés à lui depuis un certain moment, puisque si l’on en croit la vision de Rey dans The Force Awakens, ils ont participé à massacrer les élèves du temple Jedi de Luke. Mais rien n’est sûr, et encore moins avec une vision qui est plus symbolique que littérale. On peut néanmoins y voir que seul Ben manie le sabre laser, ce qui laisse douter de leur aptitude à manier la Force. Bref, ils sont presque vitaux à cette conclusion, mais le mystère total les entourant pourrait jouer en leur défaveur, d’autant plus s’il faut suivre la possible série TV qui leur sera consacrée selon une récente rumeur.

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Qui sont-ils ? Où sont-ils ? Que sont-ils ? Aura-t-on des réponses ?

Le développement de la relation Rey/Ben

L’opposition entre la Lumière et les Ténèbres, c’est le socle de Star Wars, mais le lien entre les deux a toujours été exploré dans la saga, et la postlogie ne fait pas exception. Ici, cela se matérialise par la relation qu’entretiennent Rey et Ben, qui a pris un certain tournant lors de The Last Jedi, ces derniers devenant relativement intimes. Si l’on apprenait que le lien télépathique qu’ils entretiennent fut créé par Snoke, sa mort semble ne pas y avoir mis fin, signifiant que leur connexion est maintenant profonde et réelle. Cependant, lors de la dernière scène de liaison télépathique à laquelle nous avons le droit, Rey ferme littéralement la porte à Ben, et probablement aussi symboliquement, signifiant qu’elle n’a désormais plus d’espoir de le voir se repentir. Ajoutons à ceci une Leia qui admet elle-même que son fils est définitivement perdu, et la perspective d’une suite de relation intime entre les deux devient bien mince. Pourtant, Abrams n’a que l’embarras du choix à ce niveau : il pourrait tout aussi bien en rester là et les présenter comme des opposants parfaits que poursuivre cette connexion difficile et complexifier les enjeux qui les oppose. Particulièrement fan de cet élément de The Last Jedi, et bien que j’accepterai aussi un manichéisme profond propre à Star Wars, j’aimerais suivre davantage ce développement inédit à la saga de films. Lier ces deux personnages permettrait d’apporter un certain équilibre à la postlogie. Je m’explique : Rey est clairement l’héroïne de cette trilogie, qui s’inscrit elle-même dans la saga des Skywalker, alors qu’elle est à priori d’aucune ascendance particulière. Le vilain de cette trilogie, bien que son affiliation soit trouble, c’est clairement Ben Solo, alors qu’il est le nouveau visage de la famille Skywalker. En ce sens, il est à la postlogie ce qu’Anakin était à la prélogie et Luke à la trilogie originale. Ici, le point d’ancrage est quelque peu excentré pour se répartir entre les deux côtés de la Force, et à cet égard, chacun des deux personnages a à apporter à l’autre, que ce soit dans leur développement que dans la légitimité qu’ils représentent. Au final, je pense même que cette relation constitue le salut de la postlogie tant elle pourrait apporter à la saga.

Rey Ben
Jamais un toucher de main ne m’aura semblé si crucial

Un besoin de dépaysement et d’innovation

On touche ici au point le moins précis de ce petit cahier des charges (qui m’est propre bien évidemment). Comme dit précédemment, la postlogie est une extension de la trilogie originale comme l’était la prélogie. Elle est censée lui apporter du neuf, ce qu’a largement fait George Lucas avec les épisodes I/II/III, que ce soit au niveau visuel, historique, ou scénaristique. L’expérimentation, c’est ce qu’aime le papa de Star Wars, et c’est ce qu’il aurait voulu de cette postlogie, dont il avait déjà en tête une image plus ou moins précise. The Force Awakens l’a poliment déçu, et ce pour la simple raison qu’il est bien plus un hommage qu’une nouvelle pierre à l’édifice (vous pouvez compter le nombre de fois où j’utilise cette expression). Les paragraphes précédents le disent assez : la postlogie manque de réelles nouveautés. Elle surfe sur ce qui a été fait précédemment, elle approfondit certains concepts, elle propose parfois un angle différent, mais au final on navigue toujours plus ou moins dans les mêmes eaux. Et il n’y a pas forcément de chercher sur le fond pour faire ce constat, la forme étant assez révélatrice. L’un des gros reproches fait par les fans envers The Force Awakens, c’était son manque d’exotisme, ses environnements très réalistes et finalement pas très dépaysants. Cela, on le doit à une fidélité à la trilogie originale, qui ne pouvait pas vraiment se permettre de créer des environnements extérieurs complètement différents. Du temps est passé, Lucas a pu se faire plaisir avec la prélogie, et le résultat on le connait : un tas de planètes très exotiques qui ont considérablement enrichies cette galaxie lointaine. En comparaison, l’environnement le plus foufou qu’on a eu dans la postlogie, c’est pour l’instant la planète minière de Crait dans The Last Jedi. Alors certes, il y a une certaine continuité qui ressort de ces choix, mais mince, c’est Star Wars quand même !

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En quelques secondes, la prélogie est déjà plus dépaysante

Inscrire la postlogie dans un héritage complet

Ce qui fait une parfaite transition avec un autre point important : cette postlogie renie à mes yeux trop son héritage prélogique. Ce n’est pas un secret, Abrams ne l’aime pas, une partie des fans ne l’aime pas non plus (c’était le bouc émissaire avant la postlogie), et Disney ne mise par conséquent par plus que ça dessus. Si de petits hommages parsemaient The Force Awakens, c’est The Last Jedi qui a commencé à réellement faire le lien avec cette trilogie plus récente, notamment quand Luke expose les erreurs des Jedi. L’un de mes désirs les plus chers serait de voir Hayden Christensen reprendre son rôle dans l’épisode IX sous forme de Fantôme de la Force, à l’instar de Yoda dans The Last Jedi. Si cette idée sonne fan-service, elle est en fait complètement cohérente puisque le développement de Ben Solo tourne autour de l’image qu’il s’est construite de son grand-père. Si l’on va encore plus loin, puisque Anakin était à priori l’élu, le nouveau déséquilibre le concerne, de même que l’existence de Rey qui semble être la nouvelle élue de la Force, et qui a été réveillée par le toucher de son sabre laser. Et là, c’est le moment où vous vous dites « T’es bien gentil, mais tu disais pas justement que revenir sur le passé, c’était perdre du temps qu’on n’avait pas ? », et vous avez tout à fait raison ! Mais j’ai aussi dit que cette postlogie avait besoin de s’inscrire davantage dans la saga Skywalker, alors « conclure » en revenant partiellement là où « tout » a commencé, ça ne me paraît pas complètement délirant non plus. Il faut bien comprendre que terminer avec un Skywalker qui a mal tourné et se fait vaincre, c’est pas ce qu’il y a de plus fulgurant, et ça serait même insultant pour ce que Lucas a construit au fil de sa vie.

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Un ajout controversé de l’épisode VI qui fait le lien avec la prélogie

A mon sens, il est important pour les fans de considérer cette trilogie comme ce qu’elle est vraiment plutôt que comme nous aurions aimé qu’elle soit, et ce dès maintenant. Même si J.J. Abrams se montre au top de sa forme, l’épisode IX a de très grandes chances de décevoir, ou devrais-je dire de ne pas répondre à toutes les attentes et questions tant la construction de la postlogie est branlante. Son importance n’est toutefois pas négligeable, car il n’est pas seulement décisif pour sa trilogie, mais aussi pour l’image future que donnera la saga. Malgré cela, il n’est en aucun cas impossible de l’aimer, et ce malgré tous les problèmes relevés à travers cet article. J’ai moi-même adoré ces deux films au cinéma, d’autant plus quand The Force Awakens a été mon premier Star Wars en salle, et je prend beaucoup de plaisir à les revoir. Mais il était à mes yeux important de revenir sur le défi que présente la suite et par conséquent de souligner ce qui me semble être dérangeant dans ce qui a été effectué jusqu’ici. Toi, lecteur, tu partages peut-être mon point de vue, ou peut-être pas, mais quelque soit le cas, je t’invite fortement à lancer une discussion !

5 commentaires sur « En quoi Star Wars IX est-il un épisode décisif ? »

  1. Sans surprise, ton article est très intéressant. Pour être honnête, je n’ai pas aimé l’épisode 8, lors de sa sortie en salle. Mais j’ai appris à l’apprécier, en le voyant plusieurs fois. Il ne faut pas que la déception entraînée par certaines attentes, influence trop notre opinion du film. Qui peut se révéler bon, parce qu’il nous surprend.
    Le grand 8 qu’il y a entre le 7 et le 8 n’en est pas moins déroutant. Passer d’un épisode presque copié-collé, dans sa structure, à quelque chose qui détourne tous les standards, toutes les attentes de la saga ; il fallait l’oser !
    Du coup, la trilogie n’a pas d’identité propre pour l’instant. Il est vrai qu’il est difficile de savoir où cette trilogie veut en venir (sans pour autant dire qu’elle est incohérente). Et ce problème surgit tant dans sa forme que dans ce qu’elle narre.
    La trilogie originelle avait ses valeurs. Et la prélogie aussi, n’en déplaise à certains. Ça me gêne profondément qu’elle soit boudée, à ce point, au risque de rendre l’univers incohérent. Peut-on vraiment ignorer ce qu’il nous chante, sous prétexte qu’on aime ou pas ? Et tu as raison, certaines choses lancées par la prélogie manquent cruellement, à mon sens.
    Personnellement, je n’ai aucune idée de ce que l’épisode 9 va amener. Je n’ose même pas imaginer ou attendre quoi que ce soit. Mais je trouve que le changement de réalisateur se fait avec moins de cohérence et de respect que dans la saga Harry Potter, par exemple.

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    1. Merci beaucoup ! Je suis d’accord sur le fait qu’il faille savoir prendre une œuvre comme elle est, mais dans l’optique d’une saga telle que Star Wars, les attentes entrent forcément en compte, autant du côté du créateur que du spectateur.
      Quant au dédain qu’a Abrams pour la prélogie, on va dire que le fait qu’il puisse l’exprimer fait partie de sa liberté créative. Encore faudrait-il que ce soit bien pour le bien de la création, ce qui est questionnable. J’ai malgré tout encore l’espoir de voir plus d’éléments de la prélogie dans le IX, principalement la présence de Christensen. Mais tu as clairement raison pour le manque de cohérence pour la transition des réalisateurs, comparé à Harry Potter où ça s’était très bien fait. Ça s’explique en partie par le fait qu’il y avait un matériel original ainsi qu’un respect pour celui-ci, ainsi que pour le travail des prédécesseurs.
      Je pense que tu t’évites une certaine déception inévitable en n’ayant pas d’attentes. Pour ma part, je serais incapable de ne pas en avoir, ça fait partie de ma passion pour cet univers. Ça fait presque partie du jeu pour moi.

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      1. Justement, Christensen est tellement critiqué, et les fanboys ont une telle influence maintenant, que je doute de le voir revenir :/

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      2. Et vu qu’Abrams n’est clairement pas fan de la prélogie, il y a vraiment peu de chance que ça arrive en effet. Mais bon, c’est restera un fantasme du fan que je suis, et une sacrée occasion manquée à mon sens…

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